Ce que le Guardian pense de Barroso...

Publié le par JS03 Europe

Le Conseil européen (organe de l'Union Européenne qui regroupe les 27 chefs d'Etat et de Gouvernement), réuni les 18 et 19 juin à Bruxelles, a décidé, à l'unanimité, la reconduction de Barroso à la tête de la Commission Européenne.


Toutefois, la ré-élection de Barroso n'est pas assurée puisque le Parlement européen a également son mot à dire. D'ailleurs, voici ce que le journaliste britannique David Cronin (du Guardian) donne à penser aux Eurodéputés :


"Les spéculations sur l'avenir de José Manuel Barroso devraient aller bon train maintenant qu'il s'est officiellement déclaré candidat à sa propre succession pour la présidence de la Commission européenne. L'intéressé a souligné que le renouvellement de son mandat était soumis à l'approbation des gouvernements et des députés européens, mais je serais surpris que ses ambitions suscitent une grande opposition. Et c'est bien dommage.

Ses partisans laissent entendre qu'il jouit d'une sorte de mandat naturel au prétexte qu'il est membre d'un parti de centre-droit et que c'est ce camp qui a emporté une majorité de sièges lors des dernières élections. Pourtant, le nom de Barroso ne figurait sur aucun des bulletins de vote proposés aux électeurs des vingt-sept pays membres. Et, à ma connaissance, aucun candidat n'a fait campagne en disant qu'il fallait voter pour lui afin de faire réélire Barroso à la présidence de la Commission.

Loin de faire l'unanimité auprès des électeurs, Barroso a été très sévèrement critiqué chaque fois que les citoyens européens ont eu l'occasion de se prononcer sur sa politique. Après le rejet par la France et les Pays-Bas du projet de constitution européenne qu'il défendait, Barroso a manigancé avec les chefs d'Etat et de gouvernement afin de le présenter à nouveau sous la forme du traité de Lisbonne. Il y a tout juste un an, celui-ci a été rejeté par l'Irlande, le seul pays ayant soumis son approbation à un référendum populaire. Mais Barroso refuse d'accepter le "non" irlandais et réclame la tenue d'un second vote.


Ne serait-ce qu'à cause de son mépris des pratiques démocratiques, Barroso mériterait d'être chassé sans autre forme de procès. A l'heure où les difficultés économiques et écologiques mondiales exigent abnégation et créativité, Barroso s'est entouré des représentants d'une orthodoxie discréditée et d'une rapacité incalculable. Pour l'aider à sortir de la crise financière, il a fait appel à Callum McCarthy, ancien président de la Financial Services Authority [autorité chargée de réguler les services financiers au Royaume-Uni], lequel qualifiait de "réaction irrationnelle" les appels lancés en 2007 pour un contrôle plus étroit des marchés financiers. Pour lutter contre le réchauffement climatique, Barroso a recruté Peter Sutherland, dont la société, British Petroleum, figurait en 2005 parmi les dix entreprises les plus mal notées dans le monde en matière de protection de l'environnement.


Barroso n'a jamais cessé de faire passer les profits des entreprises avant le bien commun. Non content d'essayer d'ouvrir à la concurrence la fourniture de certains biens et services essentiels, Barroso a aussi intrigué avec Peter Mandelson afin d'obliger les pays pauvres à accepter des accords commerciaux désastreux pour leur économie. Il a également défendu la production d'organismes génétiquement modifiés et a tenté de faire autoriser sur le marché des milliers de produits chimiques sans tests sanitaires préalables.



Il y a cinq ans, Barroso a dû renoncer à faire nommer Rocco Buttiglione au poste de commissaire européen à la Justice devant le tollé des députés européens, indignés par l'homophobie de ce dernier. Barroso s'était alors engagé à accorder une attention particulière au respect des droits fondamentaux des citoyens. Pourtant la Commission n'a cessé de tergiverser pour l'adoption de nouvelles lois anti-discrimination. Sa politique en matière d'immigration et de droit d'asile s'inspire de la droite radicale et soutient l'emprisonnement jusqu'à 18 mois des demandeurs d'asile ayant vu leur requête rejetée.


Par ailleurs, Barroso n'a toujours pas fourni d'explication satisfaisante sur la participation du Portugal au programme d'emprisonnement et de torture de la CIA (pudiquement baptisé "programme de reddition extraordinaire") à l'époque où il était Premier ministre. Les militants pacifistes, en outre, ne lui pardonneront jamais d'avoir organisé le sommet des Açores en 2003, au cours duquel George W. Bush et Tony Blair ont mis la touche finale à leur plan d'invasion illégale de l'Irak qui a mis le pays à feu et à sang.



Les députés européens nouvellement élus à Strasbourg ont fait d'innombrables promesses sur leur détermination à défendre les intérêts des citoyens.
S'ils pensaient vraiment ce qu'ils disaient, ils devraient maintenant relever Barroso de ses fonctions."

 

(traduit par le site presseurop.eu) 

Publié dans Actualité Européenne

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I
Voilà un article très intéressant et en particulier sur ce que dénonce le journaliste du Guardian sur les nominations dans l’équipe de Barroso de personnalités britanniques et leurs activités. Néanmoins, et tout en étant profondément d’accord avec l’esprit de cet article qui s’oppose à la réélection de JM Barroso à la présidence de la Commission, il est important de préciser certaines choses. <br /> <br /> Tout d’abord, c’est en raison de leur obligation constitutionnelle que l’Irlande doit ratifier ce traité européen par référendum. Aussi je rappelle que ce n’est pas la première fois que l’on « oblige » ou « contraint » les citoyens d’un pays à revoter (les Danois sur le traité de Maastricht et les Irlandais sur le traité de Nice). M. Barroso n’est peut-être pas très soucieux du respect à accorder à un scrutin démocratique –comme le pense l’auteur de l’article-, mais au moins ce qui est sûr c’est qu’il n’est pas le seul et que les pressions sont également venues d’Etats (par exemple du président français pour ne pas le nommer). <br /> Aussi, sur la composition des commissaires il faut souligner le fait que le président de la Commission est choisi d’un commun accord des chefs d’Etats des Etats-membres de l’UE mais qu’il doit négocier avec eux la sélection des commissaires. Cette étape étant relativement opaque (mais grâce au pouvoir du Parlement cela lui donne quelques aspects démocratiques) il reste difficile de savoir à qui attribuer la proposition de la candidature de M. Buttiglione. <br /> <br /> José Manuel Barroso est extrêmement libéral dans sa vision économique mais malheureusement le libéralisme de la Commission ne date pas que de sa présidence. En revanche, ce que l’on peut remarquer c’est que José Manuel Barroso a été président du parti social démocrate portugais tout en étant au même moment vice-président du parti populaire européen (parti de droite de l’Union). Il en ressort des interrogations essentielles sur l’état des convictions politiques profondes de ce monsieur…
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